• Mise au point de L'APMEP L'APMEP

    (Association des Professeurs de Mathématiques de l'Enseignement Public)

     

      fait une MISE AU POINT en vidéo

    sur la présence des Mathématiques dans le tronc commun 


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  • Les mathématiques plébiscitées malgré la fin des filières au lycée

     

             C’est l’heure du choix pour la première génération qui personnalisera son parcours. Mais certaines logiques d’orientation, comme la « voie royale » scientifique, prédominent.

     

    Par Mattea Battaglia et Camille Stromboni

    Le Monde du 23 avril 2019

     

    Deux choix de raison, un choix de cœur : voilà où en est Pablo, lycéen à Paris, dans sa réflexion sur son orientation en classe de 1re, en ce début de vacances de printemps. « J’y suis presque, confie-t-il, et sans trop de stress. » En septembre, cet élève de 2de au profil « plutôt littéraire » pense opter pour les spécialités « mathématiques » et « numérique et sciences informatiques » (NSI) – « du lourd, pour assurer mon avenir », explique le jeune homme, qui se voit bien travailler dans l’audiovisuel. Il complétera cette combinaison de matières par une touche d’histoire-géographie, « parce que ça me plaît et que j’ai envie de creuser ».

    L’heure du choix est venue pour cette première génération de lycéens qui expérimentent, à compter de septembre, la fin des filières (S, L et ES) dans la voie générale. A eux de personnaliser leur parcours en adossant à un « tronc commun » d’enseignements trois « spécialités » choisies parmi une douzaine en 1re – puis deux en terminale.

    Le gouvernement leur a promis un lycée apportant à la fois « plus d’approfondissement » et « plus de liberté ». « Faites-vous plaisir » : tel est le message adressé par Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’éducation, aux lycéens. Mais le tableau en train de se dessiner montre qu’il n’est pas simple de remettre en jeu les logiques d’orientation. Au premier rang desquelles la prédominance de la filière scientifique érigée en « voie royale ».

    « Passage obligé »

    Pas moins de 70 % des élèves de 2de envisagent ainsi de prendre la « spé maths », selon les premières estimations du ministère de l’éducation, fondées sur les vœux de 280 000 élèves issus de 1 335 lycées publics (soit près du tiers de cette classe d’âge). Ils sont aussi plus d’un sur deux à opter pour les sciences de la vie et de la Terre et la physique-chimie (respectivement 52,2 % et 50,1 %).

    A écouter les lycéens, ce choix des maths se justifie diversement. « Non seulement j’aime ça, mais j’en ai besoin si je veux travailler plus tard dans l’aéronautique », explique Nathan, en 2de à Paris, qui a aussi opté pour la physique-chimie. Pour Maëlis, lycéenne à Versailles, « être bonne en maths » a compté ; « et ça m’emmènera forcément quelque part », estime-t-elle. D’autres y voient un « passage obligé », reprenant à leur compte les conseils de leurs enseignants qui n’ont pas fini de s’émouvoir de la disparition des mathématiques du tronc commun (des notions de maths seront intégrées à un enseignement scientifique proposé à tous). « Arrêter les maths à la fin de la 2de, même quand on n’est pas un matheux, ça fait un peu peur, reprend Pablo. On a le sentiment de se fermer des portes. »

    « Les maths, ce n’est presque pas un choix : c’est un prérequis pour poursuivre des études », argumente Jehane. Cette lycéenne en Seine-Saint-Denis a déjà finalisé son choix, et il implique d’aller toquer à la porte d’un nouveau lycée : la spécialité « humanités, littérature et philosophie », que cette adolescente veut suivre « à tout prix » (en plus des maths et de la physique-chimie), n’est pas enseignée dans l’établissement où elle étudie. « J’ai essayé d’appliquer une recette rassurante, ne sachant pas trop ce que je veux faire plus tard : prendre deux enseignements scientifiques “costauds” et un pour le plaisir », explique-t-elle.

    Rien de surprenant à ce que des « démarches stratégiques » se perpétuent, observe la sociologue Anne-Claudine Oller. « Quand on a un projet professionnel peu défini, comme c’est le cas de beaucoup de jeunes à 15-16 ans, on essaie de rester dans une grille d’orientation la plus large possible, décrit la maîtresse de conférences en sciences de l’éducation à l’université Paris-Est-Créteil. Or, dans l’esprit des parents et des enseignants, la filière S mène à tout, donc ils la reproduisent. » La mise en place des nouvelles règles à l’entrée de l’université, sur la plate-forme Parcoursup, pousse aussi à privilégier la « sécurité » et la « cohérence », ajoute-t-elle.

    « Surchoix » des maths

    Ce « surchoix » des maths, comme disent déjà les observateurs de l’école, est-il le signe que la réforme du lycée passe à côté de ses objectifs affichés ? C’est en tout cas la lecture qu’en a donnée le syndicat SNES-FSU dans son enquête portant sur 4 000 lycéens diffusée le 18 avril : il assure que la « hiérarchie des filières fait place à une hiérarchie des spécialités ». Pour le syndicat majoritaire dans le secondaire, le « lycée Blanquer » – auquel il s’oppose – ne remet pas en question la « domination quantitative de la série S », pas plus que les « inégalités sociales » ou « de genre » dans les parcours scolaires.

    Au ministère de l’éducation, on défend une tout autre lecture de la situation, en rappelant que les choix d’orientation ne seront définitifs qu’en juin. « Les enseignements scientifiques sont plébiscités par les élèves », reconnaît Jean-Marc Huart, directeur général de l’enseignement scolaire, mais le « gain en attractivité » des autres disciplines est lui aussi important. La preuve par les chiffres : les sciences économiques et sociales, réservées jusqu’à présent aux 100 000 élèves de la série ES, sont déjà demandées par presque 150 000 élèves ; la spécialité « humanités, littérature et philosophie », par 72 000 lycéens, alors que la série littéraire regroupe aujourd’hui 45 000 des élèves inscrits en filière générale.

    « Si la réforme reproduisait la série S, les combinaisons strictement scientifiques seraient à hauteur des 53 % d’élèves actuellement inscrits en 1re S, insiste M. Huart. Or ces combinaisons strictement scientifiques ne représentent, selon nos remontées provisoires, que le tiers des demandes. » Le SNES-FSU, lui, les a chiffrées à plus de la moitié, sur un panel d’élèves toutefois inférieur à celui du ministère.

    Au-delà de la querelle autour de la « voie royale » reste, pour les lycéens, la difficulté à raisonner en faisant fi des filières actuelles. Sajetan, lycéen parisien qui se verrait bien « médecin », le dit spontanément : « Je me dirige vers une 1re S. » Idem d’Agathe, qui étudie en Seine-Saint-Denis : « J’ai fait en sorte de reconstituer un bac ES en assemblant les spé maths, sciences économiques et sociales et histoire-géo. » « Je suis un peu juste en sciences », confie Régis, élève à Tours, qui a abandonné son « rêve d’aller en S » au profit d’une « triplette ES ». « J’ai réfléchi avec mes profs et avec mes parents aux combinaisons possibles, et je suis rassuré : ce n’est finalement pas si compliqué que ça de reconstituer les séries », estime l’adolescent.

    D’autres ont dû faire avec les « contraintes pratiques » : plus de neuf lycées sur dix, d’après le ministère, parviennent à proposer à leurs élèves au moins sept enseignements de spécialité. Pour certains lycéens, le choix de l’établissement intervient donc aussi dans l’équation. « C’est sûr qu’il y a des établissements où l’offre est plus large, d’autres moins… Mais est-ce si différent qu’avant ? », interroge Agathe, lycéenne en Seine-Saint-Denis, dont quatre camarades doivent changer de lycée pour obtenir l’orientation de leur choix. Emma, scolarisée dans le privé à Paris, fait état d’une autre contrainte : la cohérence des emplois du temps. « Quand les créneaux horaires des spécialités se chevauchent, il faut bien privilégier la faisabilité », glisse la jeune fille.

    Missionné par Jean-Michel Blanquer pour préparer la réforme du lycée et du baccalauréat, l’universitaire Pierre Mathiot a passé en revue les premières remontées ministérielles. Pour lui, un peu plus de la moitié des vœux émis par les lycéens reprennent les combinaisons des anciennes séries. La moitié, dans le même temps, s’émancipent de ce cadre. « C’est déjà un vrai changement pour cette première année d’application », se réjouit-il.

     

    Source : https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/04/23/reforme-du-lycee-les-maths-restent-plebiscitees_5453647_3224.html

     


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    Fact-checking Réforme du lycée : le vrai/faux de Jean-Michel Blanquer Face aux critiques des enseignants et aux inquiétudes des parents, le ministre de l’Education nationale vante les mérites de la nouvelle organisation… Quitte à s’arranger parfois avec les faits.
     
     
    Eva Mignot - Alternatives économiques du 11/04/2019
     
     
    Impopulaire auprès des syndicats, la réforme du lycée inquiète élèves et parents. L’instauration de « spécialités » choisies par les élèves en première et terminale fait voler en éclat les anciennes filières et bouleverse les habitudes. Le ministre de l’Education nationale cherche à rassurer en multipliant les prises de parole dans les médias. Mais en jouant sur les mots, Jean-Michel Blanquer se permet de brouiller les pistes. Alternatives Economiques a relevé plusieurs incohérences du ministre, qu’il a notamment répétées au micro de France Inter fin mars.
     
     

     

    Il a dit : « La réforme ne conduit pas à une pré-orientation. »

    PAS TOUT À FAIT VRAI. Le ministre laisse penser que les trois choix de spécialités en première n’auront pas d’incidence sur la poursuite d’études. D’ailleurs, sur le site Quand je passe le bac mis en place par l’Education nationale, il est indiqué qu’« une formation de l’enseignement supérieur ne peut pas exiger un enseignement de spécialité en particulier. »

    Mais dans les faits, certains établissements refuseront des candidats dont le profil ne correspondra pas à leurs attentes. Ce sera notamment le cas des classes préparatoires scientifiques, qui ne peuvent se dispenser d’acquis solides en mathématiques, voire en physique. Si une combinaison de spécialités ne déterminera pas les études que vous suivrez, elle pourrait cependant vous fermer certaines portes.



    Il a dit : « Les élèves ont la possibilité de changer de spécialité entre la première et la terminale. »

    CELA RELÈVERA DE L’EXCEPTION. En affirmant que les choix des élèves sont réversibles, Jean-Michel Blanquer cherche à rassurer. Mais, comme il est peu courant de changer de filière aujourd’hui et de passer, par exemple, de première ES en terminale S, le changement de spécialité s’avérera difficile, même impossible. D’autant plus que les élèves doivent déjà abandonner l’une de leurs spécialités entre les deux niveaux (ils en suivent trois en première et deux en terminale).

    Ce changement d’enseignement sera conditionné tout d’abord aux contraintes de places : les élèves ayant suivi la spécialité en première seront quoi qu’il en soit prioritaires sur les autres. Et surtout, la démarche doit être acceptée par l’établissement. « A titre exceptionnel, le choix en classe de terminale d’un enseignement de spécialité différent de ceux choisis en classe de première est possible à la demande de l’élève et sur décision du chef d’établissement, après avis du conseil de classe en fin d’année de première », relève le bulletin officiel de l’Education nationale du 5 septembre 2018.

    Cela demandera une certaine organisation de la part des établissements alors que la réforme est déjà un vrai casse-tête en termes d’emploi du temps. En outre, mettre en place une remise à niveau des élèves serait, pour les lycées, encore plus contraignant.

     

    Il a dit : « Les mathématiques sont la seule discipline que l’on trouve aux trois étages de la réforme : vous avez un peu de mathématiques dans le tronc commun, au travers de l’enseignement scientifique. Ensuite, vous avez l’enseignement de spécialité, exigeant. Et vous avez en troisième lieu, dans les options, “maths complémentaires” pour ceux qui ne font pas de spécialité en maths et “maths expertes” pour ceux qui veulent approfondir. Ce n’est pas tout ou rien. »

     

     

    VRAI MAIS… Comme le dit le ministre lui-même, il n’y a vraiment que peu de mathématiques dans le tronc commun. L’enseignement scientifique est essentiellement composé de physique-chimie et de sciences de la vie et de la Terre. Il est même improbable que les professeurs de mathématiques viennent y dispenser quelques heures d’enseignement.

    Par ailleurs, pour suivre l’option « mathématiques complémentaires », uniquement disponible en terminale, il est fortement recommandé d’avoir choisi la spécialité en première : ces élèves seront prioritaires. Or, les places risquent là encore d’être limitées…

    Il se pourrait même, contrairement à ce que laisse entendre le ministère, que seuls les élèves ayant suivi la spécialité mathématiques en première puissent sélectionner l’option. L’Association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public a rencontré en mars dernier le conseiller en charge des affaires pédagogiques, qui leur a confirmé que c’était le message qu’il avait rappelé aux recteurs.



    Il a dit : « Les spécialités donnent la possibilité d’aller plus loin. C’est pour cette raison que les programmes sont plus exigeants. »

    GLOBALEMENT VRAI. C’est notamment le cas pour la spécialité « mathématiques », considérée comme assez ambitieuse. Ce qui n’est d’ailleurs pas sans inquiéter les professeurs. En effet, le programme est aussi poussé, voire davantage, que celui de première S actuellement. Or, de nombreux élèves vont choisir cette discipline non parce qu’ils l’apprécient ou qu’ils la maîtrisent, mais parce qu’elle peut être essentielle pour leurs études. Si certains peuvent être motivés et chercher à s’accrocher, d’autres risquent fort d’être laissés sur la touche.


    Il a dit : « Plus de 90 % des lycées proposeront au moins 7 spécialités […]. Il y a une offre beaucoup plus riche. Un lycéen de la voie générale avait, jusqu’à l’année dernière, le choix entre trois séries. Désormais il y aura une vingtaine, voire une trentaine de combinaisons possibles. »

    EXAGÉRÉ. Sans conteste, comme l’assure Jean-Michel Blanquer, l’offre d’enseignements sera plus riche. Avec 3 spécialités à choisir parmi 7 proposées, 35 combinaisons de parcours sont effectivement possibles. Du moins théoriquement.

    Dans les faits, pour des raisons d’organisation des emplois du temps, plusieurs établissements limiteront certainement les choix des élèves en proposant des « menus » préalablement établis et ce, en dépit des consignes contraires du ministère de l’Education nationale. Au lieu de laisser les élèves sélectionner leurs disciplines parmi celles proposées, les lycées mettront en avant des combinaisons de matières. Les cocktails originaux tels que arts-mathématiques-langues anciennes ou encore physique-littérature-sciences économiques et sociales ne seront ainsi pas possibles partout.

    Par ailleurs, si l’on regarde l’offre effectivement proposée dans chacun des lycées de France, la proportion d’établissements offrant les 7 spécialités est plus proche des 80 % que des 90 %.



    Il a dit : « S’il y a la spécialité “sciences de l’ingénieur” dans un lycée à quelques centaines de mètres ou à un ou deux kilomètres dans la ville, il est possible de la suivre là-bas. »

    C’EST PLUS COMPLIQUÉ. L’Education nationale signale qu’un élève peut changer d’établissement ou suivre l’enseignement souhaité dans un autre lycée s’il n’est pas proposé là où il est inscrit. Mais ce sera loin d’être systématique, même plutôt rare. Il faut tout d’abord que les lycées concernés passent un accord de mutualisation de spécialité. Et surtout, il doit rester des places dans ces classes : or, celles-ci seront limitées par les moyens de chaque établissement et le fait que les élèves extérieurs ne seront pas prioritaires.


    Il a dit : « Le sujet n’est pas tellement les moyens supplémentaires que la manière intelligente de les répartir […]. Jusqu’à aujourd’hui, vous aviez des classes de S à 35 et des classes de L à 15. Ce n’est pas raisonnable. C’est le genre de choses qui vont changer. »

    VRAI… MAIS PAS FORCÉMENT RASSURANT ! Les classes seront certainement plus équilibrées. Mais le nombre moyen d’élève se rapprochera davantage de 35 que de 15 ! Les établissements devront diviser leurs effectifs de chaque niveau par 35 (effectif maximum d’une classe fixé par la réforme) pour connaître le nombre de classes. Les 16 heures de tronc commun devraient se dérouler avec un effectif important, en particulier dans les grands lycées, car l’effet de seuil sera faible : si la présence de quelques élèves supplémentaires obligent à la création d’une classe supplémentaire, cela ne fera diminuer l’effectif moyen par classe que de deux ou trois élèves.

    Tout se complique encore lorsque sont prises en compte les trois spécialités choisies par chaque lycéen. Le nombre d’heures de spécialités allouées correspondra au triple du nombre de groupes de 35 élèves constitués à partir des effectifs globaux de première. Or, cela a toutes les chances d’être insuffisant : cela suppose, à peu de choses près, que les élèves de chaque groupe choisissent les mêmes disciplines. Toute spécialité qui s’ouvrira en plus sera alors financée sur une « marge », dont dispose chaque établissement, à hauteur de 8 heures par semaine et par groupe de 35 lycéens en première et terminale. Mais c’est également sur cette marge que doivent être prises les heures consacrées à divers dispositifs spécifiques…

    Prenons un exemple : un lycée accueillant 140 élèves de niveau première sera doté à hauteur de 12 groupes de spécialités (4 classes × 3 spécialités). Si, du fait des choix des lycéens, l’établissement doit finalement ouvrir 17 groupes de spécialité, il devra en financer 5, soit 20 heures (5 × 4 heures de spécialité) sur sa marge de 32 heures (8 heures × 4 classes de 35 élèves). Il ne restera alors que 12 heures pour dédoubler les classes (difficile de privilégier l’oral en cours de langue à 35 élèves !), ajouter de l’accompagnement personnalisé, aider les élèves dans leur orientation et assurer parallèlement les horaires des options facultatives…

    Inévitablement, l’étendue de la palette de choix des enseignements de spécialité se fera donc au détriment des conditions générales d’enseignement. Pas sûr que les élèves soient gagnants !

     

    Source : https://www.alternatives-economiques.fr/reforme-lycee-vraifaux-de-jean-michel-blanquer/00088943?utm_source=social&utm_medium=facebook&utm_campaign=BoostArt%2FVFBlanquer%2F190411&fbclid=IwAR2jUeziRgCnIVgcmnu7Onvp_jKw8ehqy-2S83JGcJc2dy8-Ykapdz4I238

     
     

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  • Dans certains lycées, on manifeste contre les réformes « Blanquer » en distribuant des 20/20Cette méthode ne plaît pas à certains lycéens et parents, qui s’inquiètent des conséquences potentielles de la manipulation.

     

    Violaine Morin le 4/04/2019

     

    « Dans l’éducation nationale, si on ne touche pas aux notes, il ne se passe jamais rien », lâche une enseignante du collectif des lycées des Deux-Sèvres, un regroupement d’enseignants contre la réforme du lycée.

    Alors qu’avait lieu, jeudi 4 avril, une journée de mobilisation contre la loi Blanquer, particulièrement suivie dans les écoles primaires, les enseignants du second degré s’organisent également pour mener des actions perlées contre les réformes du lycée et du bac. Plutôt que d’organiser une grève « qui coûte cher » et « ne fait réagir personne », ils sont de plus en plus nombreux à choisir le biais des notes pour alerter les parents d’élèves et l’opinion.

    Au lycée Corot de Savigny-sur-Orge (Essonne), Emilie (la plupart des enseignants interrogés ont requis l’anonymat) raconte avoir mis 19/20 de moyenne à ses élèves de seconde et de première sur les bulletins du deuxième trimestre. « Nous avons mis la vraie moyenne dans les appréciations, pour que les élèves et leurs parents puissent apprécier leur progression », explique-t-elle cependant.

    Sylvain Lagarde, responsable syndical du SNES dans l’académie de Toulouse, rapporte que le même principe a été appliqué « par une majorité de professeurs » au lycée Bourdelle de Montauban et, dans une moindre mesure, au lycée Clémence-Royer de Fonsorbes (Haute-Garonne) ou encore au lycée Saint-Exupéry de Blagnac (Haute-Garonne). Dans ces trois cas, « la direction de l’établissement a repris la main sur le logiciel et rétabli les notes justes », que les enseignants prennent soin de conserver.

     

    Bac blanc « partiellement boycotté »

    Dans certains établissements, les notes ont été « faussées », y compris pour les terminales. Les lycéens, qui devaient finaliser leur dossier sur la plate-forme Parcoursup avant le 3 avril à 23 h 59, s’inquiètent des conséquences de cette manipulation sur la sélection. Le ministère de l’enseignement supérieur assure cependant avoir « sensibilisé les recteurs sur les rappels à faire aux enseignants », de sorte que « le processus de remontée des notes des fiches Avenir dans Parcoursup s’est déroulé comme convenu ».

    « Ces rectifications par la hiérarchie rendent très difficile la quantification du phénomène », souligne Sylvain Lagarde. De l’avis général, dans les rangs syndicaux comme du côté de l’institution, le recours aux « fausses notes » reste minoritaire, de même que le boycottage d’épreuves blanches ou d’épreuves anticipées, autre moyen de contestation. Au lycée Prévert de Longjumeau (Essonne), on a choisi le « boycottage du bac blanc », une méthode à la fois fortement symbolique et peu risquée, puisque les enseignants ne sont pas tenus de l’organiser.

    Au lycée du Haut Val de Sèvre, à Saint-Maixent-l’Ecole (Deux-Sèvres), le bac blanc a été « partiellement boycotté », certains enseignants ayant organisé des devoirs type bac malgré tout. Au lycée Maupassant de Colombes (Hauts-de-Seine), une enseignante raconte que des oraux de TPE ont été reportés pour cause de grève, et des épreuves anticipées de langue du baccalauréat notées 20/20. Mais les véritables notes ont été conservées.

     

    « Faire réagir » sans pénaliser les élèves

    Les professeurs affirment en chœur leur volonté de « faire réagir » sans pénaliser leurs élèves. Quitte à abandonner, si leur action porte ses fruits. « Une fois passés les premiers conseils de classe où l’on mettait 20/20 de moyenne à tous, les parents ont réalisé qu’il se passait quelque chose d’important et sont venus échanger avec nous sur la réforme », raconte un enseignant du lycée Prévert de Longjumeau. « L’action ayant été suivie d’effet, nous avons préféré abandonner la méthode. Il reste difficile de ne pas mettre sa véritable moyenne à un élève qui s’est investi. »

    Du côté des parents, les réactions sont en effet mitigées, entre crainte d’être pénalisés par les nouvelles méthodes de contestation et soutien aux enseignants en lutte. « Les notes faussées sont difficiles à vivre pour les élèves et leurs parents », souligne Samuel Cywie, porte-parole de la PEEP. « Pour ceux qui sont concernés par Parcoursup, cela génère beaucoup d’inquiétude, les enseignants doivent prendre leurs responsabilités. »

    « En un sens, c’est irresponsable de traiter les enseignants d’irresponsables », s’amuse pour sa part Rodrigo Arenas, président de la FCPE. « Les parents s’inquiètent du boycottage des notes, peut-être, mais ils s’inquiètent encore plus de la réforme elle-même. » Quant au ministère de l’éducation nationale, il renvoie aux obligations réglementaires des enseignants, qui sont tenus de mener à bien les évaluations.

     

    Source : https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/04/04/dans-certains-lycees-la-contestation-de-la-reforme-passe-par-une-distribution-de-20-20_5445699_3224.html?fbclid=IwAR0n2M3YDj43-vbiDlR8tlh4dZRRcBgb318pabjf8nfAX5guit_z3j8435E

     


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  • Parcoursup. Pourquoi faut-il payer pour faire certains vœux de formation ?Il reste deux jours aux futurs bacheliers pour finaliser leurs dossiers de candidature sur la plateforme d’inscription post-bac. À cette occasion, des familles découvrent que certaines écoles, même publiques, exigent de sortir le chéquier, simplement pour candidater.

     

    Avant ce mercredi 3 avril à 23 h 59, les futurs bacheliers et les étudiants en réorientation doivent finaliser leur dossier sur Parcoursup pour candidater dans les formations du supérieur qu’ils souhaitent intégrer en septembre. Cette étape de validation est importante, car si les vœux saisis sur la plateforme ne sont pas validés, ils ne seront pas transmis aux établissements.

    Les réponses seront envoyées aux candidats à partir du 15 mai. Pour cette deuxième année d’utilisation de Parcoursup, des nouveautés ont été apportées afin de réduire le temps d’attente des candidats.

     

    Confirmer sa liste de vœux finale

    Les candidats ont pu émettre dix vœux de formation, associés à 20 sous-voeux possibles (une même formation, plusieurs lieux). Pour chacun, ils doivent vérifier avant mercredi que chaque vœu est bien motivé, qu’ils ont indiqué leur préférence, que les bulletins scolaires et la fiche Avenir fournis par leur lycée sont bien renseignés dans leur dossier…

    Et qu’ils ont bien envoyé les éléments spécifiques demandés par chaque formation. Comme, par exemple, l’acquittement de frais de candidature. Un budget souvent ignoré des familles. À l’image de cette mère de lycéenne près de Lorient (Morbihan), qui n’en revient pas : « Il faut payer 37 € par vœu en école nationale supérieure d’architecture ! »

     

    Un budget à prévoir

    Elle épaule sa fille, en terminale S, dans ses démarches sur la plateforme Parcoursup et ne s’attendait pas à débourser de telles sommes. Certes, les élèves boursiers en sont exonérés, mais ce n’est pas son cas… 37 € multipliés par dix vœux, cela fait un budget. Et encore, si elle se borne aux écoles nationales d’architecture publiques. « L’université technologique de Compiègne demande 95 €. Du coup, ma fille n’a pas émis de vœu. » Car la lycéenne n’a aucune garantie d’être retenue.

     

    L’égalité des chances mise à mal

    Elle a mené sa propre enquête afin de savoir pourquoi de telles sommes sont demandées, en précisant que l’accès à Parcoursup est bel et bien gratuit : « Ce n’est pas du fait de l’outil mais bien du fait des écoles d’architecture qui, émettent ainsi des frais administratifs et récoltent l’argent. » L’Ensab (école nationale supérieure d’architecture de Bretagne) explique, par exemple, sur son site que la somme sert à une première étude des demandes de pré-inscription, qui repose sur l’examen des dossiers scolaires et de la lettre de motivation par une commission ad hoc.

    « On prône l’égalité des chances ? Plus vous avez de l’argent, plus vous pouvez émettre de vœux et donc multiplier les chances de réaliser le rêve de votre enfant, proteste-t-elle. Tout est bon pour racketter les familles ! Au final, vous pouvez perdre une importante somme, qui peut, elle, servir à payer un logement ou à se défaire des frais d’inscription dans ces mêmes écoles d’architecture. »

     

    Entre 30 et 200 € de frais

    Selon les établissements, ces frais de candidature vont de 30 à 200 €. Rien à voir avec les frais d’inscription dont il faudra s’acquitter si le candidat est reçu. Les frais exigés à cette étape sont affectés au traitement administratif des dossiers ou des concours d’admission.

    Ils sont surtout demandés par des lycées privés pour des classes préparatoires ou des écoles privées d’art, de commerce ou d’ingénieurs (par exemple, pour les banques d’épreuves qui permettent de candidater à plusieurs écoles à partir d’un seul concours, comme le concours Avenir ou Sésame). Mais aussi - et c’est moins connu - par quelques organismes publics, comme les écoles nationales d’architecture ou les écoles d’ingénieurs du réseau Insa.

     

    « On doit cet effort de transparence aux familles »

    « Les frais de gestion de dossier existent depuis longtemps, mais avec la multiplication des vœux sur Parcoursup, cette question devient centrale chez les familles », constate Bruno Magliulo, ancien inspecteur académique et auteur de SOS Parcoursup (Éditions L’Étudiant).

    Ce spécialiste de l’orientation conseille de consulter les sites de chaque formation, car elles appliquent toutes des règles différentes. Même si c’est plus rare, certaines remboursent tout ou partie des montants avancés en cas de maladie, déménagement, renoncement dans la phase de validation…

    Quoi qu’il en soit, Bruno Magliulo reconnaît que « ces frais devraient figurer sur Parcoursup dans la fiche de présentation des établissements » et a prévu de faire remonter cette demande au ministère. « On doit cet effort de transparence aux familles. »

     

                                                                    Loïc TISSOT et Laetitia HELARY

     

    Ouest-France en ligne du 2/04/2019

     

    Source : https://www.ouest-france.fr/education/etudiant/parcoursup/parcoursup-pourquoi-faut-il-payer-pour-faire-certains-voeux-de-formation-6287895

     


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